Critique : Le Crocodile du Botswanga

Antoine 22 février 2014 0
Critique : Le Crocodile du Botswanga

Réalisateurs : Fabrice Eboué, Lionel Steketee
Acteurs : Thomas Ngijol, Fabrice Eboué, Claudia Tagbo, Ibrahim Koma…
Genre : comédie qui doute du comique
Date de sortie française : 19 février 2014
Nationalité : France
Durée : 1h30
Classification : tout public

Un dictateur inconscient et un agent corrompu : Thomas Ngijol et Fabrice Eboué sont de retour pour une comédie méritante mais pas encore virtuose.

le-crocodile-du-botswanga-affiche-527b672a9a4edAprès le succès du mitigé Case Départ, on aurait pu craindre que Fabrice Eboué et Thomas Ngijol ne livrent qu’une simple variante de leur première collaboration. Pourtant, Le Crocodile du Botswanga pose très vite son postulat et ses ambitions. Didier (Fabrice Eboué), un petit agent de football, ramène dans son pays africain d’origine son talentueux poulain Leslie Konda (Ibrahim Koma). Ce dernier y vient pour disperser les cendres de sa mère et être décoré par le Président de la République Bobo (Thomas Ngijol), un dictateur qui va tout faire pour que Leslie rejoigne l’équipe nationale qu’il essaie de monter. Rapide, précise, cette ouverture inaugure un film décidant de ne jamais lâcher son rythme, quitte à tourner par moments à vide.

Blanc et noir.

Devinez de quelle viande il s'agit...

Devinez de quelle viande il s’agit…

En effet, si les défauts de Case Départ sont atténués, Fabrice Eboué et son co-réalisateur Lionel Steketee ont encore une fois livré un film trop hétérogène. D’un côté, les différents sketchs s’enchaînent en accumulant les gags (pour la plupart efficaces) et de l’autre, l’évolution des personnages et de la narration se révèlent trop maladroites et moralisatrices. Pire, elles ralentissent un récit paradoxalement vif malgré sa lourdeur volontaire. L’humour est gras pour mieux accentuer une caricature dont les aspects véridiques n’en deviennent que plus grotesques. Les deux cinéastes ont la bonne idée de ne pas se frotter à la finesse du Dictateur de Chaplin pour plus lorgner sur le potache Dictator avec Sacha Baron Cohen. Ils ont cependant compris l’enjeu principal de ces deux modèles : la magnificence de l’acteur principal. Si la mise en scène se révèle assez sobre — mais soignée — elle parvient à sublimer les trognes paranoïaques et hilarantes de Thomas Ngijol ainsi que son phrasé à l’accent fendard. Le rapport de pouvoir s’efface au vu de ce pantin ridicule manipulé par une narration qui établit une liste plutôt exacte des caractéristiques des despotes.

Des larmes de crocodile… et de rire !

Thomas Ngijol porte le film sur ses épaules de despote.

Thomas Ngijol porte le film sur ses épaules de despote.

Malheureusement, si le comédien se donne à fond, le long-métrage, lui, ne se mouille jamais totalement, comme si Eboué et Steketee se posaient la question cela dit pertinente : peut-on rire de tout ? On serait tentés de leur répondre oui, car la satire parvient par pics à mêler l’actualité (le néo-colonialisme, les affaires de prostitution dans le milieu du foot, etc.) et les rappels aux drames du XXème siècle qui semblent ne pas s’être totalement éteints. Le film n’est plus juste générationnel et touche par sa franchise que l’on aurait aimé plus présente encore. Le hors-champ n’a que peu d’intérêt et les clichés servent à éclairer le spectateur aveugle. Tout l’inverse, en somme, des médias ici fortement critiqués et qui offrent le running gag le plus poilant du film autour d’un produit miracle qui soigne le sida (approuvé par le Vatican !). Il est d’autant plus dommage que Le Crocodile du Botswanga s’adresse avant tout à un trop grand public qu’il aurait pu devenir une grande comédie noire (!) et cynique. Il faut néanmoins saluer la démarche sympathique du trio Eboué-Steketee-Ngijol, qui parvient quand même à prouver que le cinéma comique français peut encore traiter de vrais sujets de société, et poser ses couilles sur la table.

Inégal mais relativement osé, Le Crocodile du Botswanga souffre d’une certaine incertitude sur le traitement de son sujet qui aurait pu être encore plus subversif et outrancier. Mais la majorité des vannes fonctionnent et Thomas Ngijol crève l’écran, ce qui offre tout de même un crocodile assez mordant.

Bande-annonce du Crocodile du Botswanga

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